Le masque ne cache pas. il révèle. Mal utilisé dans une représentation théâtrale, il montre sans pitié les imperfections d’un acteur. Celui-ci s’affuble d’un bec, de plumes et bat des ailes, avec pour seul résultat de nous dire, avec certitude, qu’il n’est pas un oiseau.

Il faut apprendre à se servir d’un masque. Il faut d’abord le choisir, ce que personne ne peut faire pour nous. Il faut ensuite l’apprivoiser, chercher dans les anciennes techniques orientales ce qu’elles peuvent encore nous donner. Apprendre à suggérer, c’est-à-dire à vivre. et savoir qu’un masque ne déguise personne, au contraire. Quand tout miraculeusement concorde et s’harmonise, ce n’est plus l’acteur imitant l’oiseau, c’est l’oiseau devenant l’acteur.

Il en est ainsi des masques de Danielle Marie Chanut. Il faut que chacun choisisse le sien en sachant que ce choix - comme beaucoup d’autres - est illusoire. Indispensables comme toutes les choses aériennes, réels comme le rêve, ils sont plus forts que nous. ils nous dominent, ils nous asservissent tranquillement. C’est le masque qui nous choisit, comme un coup de foudre choisit sont clocher. Il nous obligent même, si tyrannique est leur empreinte, à poser, à enfouir, à détruire l’autre masque - que nous portons tous.
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LA GALERIE
DES MASQUES
 
Jean-Claude Carrière (avril 1981)